Pourquoi est-ce important de chercher des alternatives aux géants du web ?

© Girardon – https://www.instagram.com/valgirardon/

De qui parle-t-on ?

Le terme GAFAM regroupe les grandes entreprises américaines du numérique, à savoir Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft. Ces entreprises réalisent pour chacune d’entre elles des dizaines de milliards de dollars de chiffre d’affaires1. Parce que le marché mondial du numérique est gigantesque, des groupes chinois du secteur numérique et télécom ont vu le jour et constituent désormais des challengers sérieux des GAFAM américains. Ces entreprises sont aujourd’hui regroupées sous le terme de BHATX, à savoir Baïdu, Huaweï, Alibaba, Tencent, Xiaomi.

Les revenus des GAFAM et des BATX. • Crédits : Sabrina BLANCHARD, Thomas PERROTEAU / AFPAFP

Ces entreprises connaissent des développements très forts et sur des secteurs économiques très divers. Partant d’un type de service particulier dans un premier temps pour chacune d’entre elles, elles ont ensuite diversifié leurs activités vers un seul objectif, la capture de données, nos données en somme. 

Mais de quoi parle-t-on au sujet de ces données ?

Les données concernent aussi bien notre identité, nom, prénom, date de naissance, adresse mail que nos habitudes de consommation comme le contenu de nos derniers achats, leur montant et le type de produits achetés. Elles concernent aussi nos habitudes de navigation et nos centres d’intérêt à travers l’historique des sites Internet que nous visitons sur notre ordinateur ou notre mobile. L’ensemble de ces données est ainsi collecté, réuni et traité pour permettre à ces entreprises de nous « profiler », c’est à dire établir des profils type sur tous les aspects de notre vie quotidienne dans l’unique but de « mieux cibler leur offre » et de nous présenter des publicités ciblées… 

Pour aller plus loin dans cette connaissance de notre intimité, les GAFAMs proposent des services2 toujours plus attractifs, innovants et très souvent gratuits pour inciter les consommateurs à leur fournir, malgré eux, toujours plus de données.

De plus en plus de matériels permettent également de nous surveiller : montres connectées, bandeaux pour faire du sport et analyser nos déplacements ou nos caractéristiques physiques, domotique, caméras ou capteurs de toutes sortes connectés (et souvent piratables !) pour suivre nos habitudes de vie, casques ou lunettes de réalité virtuelle ou de réalité augmentée…

À quoi servent ces données ?

Ces données sont ensuite utilisées en premier lieu à des fins commerciales. En effet, la plupart des services de ces GAFAMS sont gratuits dans un premier temps. C’est le cas des services de messagerie ou des réseaux sociaux. Cependant, il ne faut pas oublier que si c’est gratuit, c’est nous le produit !

En effet, la connaissance ainsi générée permet à ces entreprises de nous inciter à acheter de nouveaux produits toujours plus innovants et désirables mais aussi très inaccessibles pour une part importante de la population. On peut prendre pour exemple le développement du marché de la téléphonie mobile. En moyenne, un smartphone peut coûter plus de 30 fois plus cher3 qu’un téléphone portable simple.

Ces entreprises formatent donc nos désirs, jusqu’à annihiler nos habitudes culturelles.

Au-delà des enjeux commerciaux, ces GAFAM infiltrent également d’autres sphères du pouvoir. En effet, leur capacité à capturer les données et notamment nos données personnelles et les stocker sur leur data centers leur permet même de rivaliser avec les États. En effet, là où les États sont cantonnés à des prérogatives au niveau d’un territoire, les GAFAM quant à elles, sont supranationales. Elles dépassent les frontières et mènent leurs activités sans se soucier réellement des conséquences économiques ou sociales de chaque pays. Elles usent d’ailleurs plutôt bien de l’incapacité des États à s’organiser entre eux voire de leur rivalité sur la scène économique. C’est particulièrement criant sur la question de la fiscalité.

Rappelons par exemple qu’en 2018, Google a payé 17 millions € d’impôts en France pour un chiffre d’affaires de 2 milliards d’€, rien que pour la publicité, en déplaçant son chiffre d’affaires réel vers l’Irlande, où elle paie moins d’impôts (Source : https://www.lepoint.fr/)

Parce que ces entreprises vont vite et souvent plus vite que les capacités de régulation des États, elles siphonnent un à un les différents secteurs de nos économies. C’est la stratégie du criquet4 évoquée par Aurélie Luttrin, présidente de Ciwik5 : « Ces entreprises mangent tout ce qui peut être mangé dans un secteur, et une fois qu’il ne reste plus rien d’intéressant, elles se déplacent et viennent se développer sur un nouveau secteur d’activité. »

Enfin, il ne faut pas oublier que ces entreprises ont une certaine façon de voir le monde notamment lié à leur pays et culture d’origine. Ainsi, en menant leurs activités, elles défendent un certain modèle de société, une certaine vision des libertés individuelles et de leur protection. La Chine et les États-Unis ont, pour ce qui concernent ces 2 États, des attitudes profondément hégémoniques et ces grandes entreprises sont aussi les vaisseaux amiraux de cette vision du monde qui peuvent mener à des dérives. En témoigne la décision par la France en août 2020, d’interdire les antennes du fabricant Huawei en raison de suspicion d’espionnage. (Source. https://www.lesechos.fr/tech- ou https://www.lemonde.fr/)

Alors qu’est-ce qu’on fait ?

D’abord, on prend conscience de la dépendance qui est en train de s’accroître entre nos  « modes de vie » et ces grandes entreprises. On prend aussi conscience du fait qu’il s’agit d’entreprises commerciales et que par conséquent, elles vont chercher à maximiser l’usage et la rentabilité de nos données. De par leur taille, les principes de concurrence aujourd’hui ne fonctionnent plus et de toutes les façons, l’histoire économique récente a démontré que le capitalisme ne sait pas s’autoréguler6. Enfin, face à l’inaction relative des États, il semble également important d’exercer son pouvoir citoyen pour s’affranchir de cette mainmise.

Vient la question des alternatives

Chez TeleCoop, on souhaite pouvoir vous proposer des alternatives libres ou open-source à l’ensemble des usages dont vous pourriez avoir besoin. Partout dans le monde, des initiatives citoyennes existent et sont aujourd’hui crédibles pour construire un monde numérique solidaire et responsable qui s’affranchisse de ce carcan hégémonique et respecte nos libertés et le respect de notre vie privée. 

Vous pourrez retrouver dans la suite des articles quelques-unes des propositions de notre communauté, bénévoles ou experts. Libre à vous d’ailleurs de les enrichir.

Note 1 – Chiffre d’affaires des GAFAMs à fin juin 2020. (Source : https://www.silicon.fr/cloud-covid-19-gafam-344268.html) et vue globale des différents revenus des GAFAM sur https://www.dailyinfographic.com/tech-giants-finance

Note 2 – Ex. les applications Whatsapp, Messenger, Instagram (dont Hyperlapse et Layout) pour Facebook, LinkedIn ou Skype pour Microsoft… En juillet 2016, Microsoft est accusé par la Cnil d’une collecte de données excessive avec son système d’exploitation pour ordinateurs et tablettes. (https://www.lefigaro.fr/)

Note 3 – On peut trouver des téléphones simples à partir de 10 € (Ex. Logicom Le Posh 178 https://www.fnac.com/ alors que le prix moyen d’un smartphone est de 326 € (https://www.20minutes.fr/) et certains smartphones dépassent les 2 000 € (Samsung Galaxy Z Fold2).

Note 4 – La stratégie du criquet des GAFAM-BATX menace la démocratie et l’économie : https://www.latribune.fr/ 

Note 5 – Ciwik est « une société qui propose au secteur public des solutions pour réinventer la vie publique, construire la souveraineté numérique des territoires et accroître leur performance économique, sociale et environnementale ».

Note 6 – « 1988-2008 : les dix plus grands scandales financiers » (https://www.leparisien.fr/archives/1988-2008-les-dix-plus-grands-scandales-financiers-21-06-2009-554955.php)

Bibliographie

Plateformes numériques : réguler avant qu’il ne soit trop tard : http://www.cae-eco.fr/plateformes-numeriques-reguler-avant-qu-il-ne-soit-trop-tard

Merci à Jean-Marie Brodu, sociétaire chez TeleCoop, pour ses recherches !

2 réflexions au sujet de « Pourquoi est-ce important de chercher des alternatives aux géants du web ? »

  1. Merci Jean-Marie, pour moi aussi la concentration du pouvoir sur nos données entre les mains de quelques entreprises est quelque chose qui m’inquiète parce que j’aime ma liberté et qu’elle a déjà pris un gros coup avec le covid.

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